• Franca Maî

     

    LA PRESSE LITTERAIRE N°2
    Janvier 2006

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    Cette interview a été réalisée en janvier 2006 par Marc Alpozzo pour le magazine : LA PRESSE LITTERAIRE N°2

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    "L’écriture est avant tout un rituel jubilatoire"

    -Marc Alpozzo : Comment êtes-vous entrée en littérature ?

    -Franca Maï : Fin de l’année 2000, j’ai opéré un virage radical dans ma vie de femme. Dans ce chemin à défricher et purement initiatique, un beau jour, j’ai écrit une lettre d’amour à un homme sous forme de « conte cruel et métaphorique ». C’était la nouvelle : « avec ma permission » diffusée depuis en free littérature sur la toile. Il ne l’a pas comprise. Etonnée et abasourdie par ce rejet violent, j’ai pris mon téléphone, j’ai composé le 222 et j’ai demandé au hasard, l’adresse de dix éditeurs. J’en ai choisi cinq. Leurs sonorités me plaisaient. J’ai envoyé la nouvelle par voie postale. Au bout de quinze jours, une jeune femme, emballée, m’appelait en me demandant si j’écrivais un roman. J’avais dans mon tiroir, une trentaine de pages de Momo qui kills qui dormait, pondue dans mon ancienne vie lorsque j’étais encore productrice de films alternatifs et poétiques et que je me cassais les dents, en toute innocence, avec la mère maquerelle « Télévision ». Cet appel téléphonique a été le talisman et comme elle se reconnaîtra, je la remercie ici.

    Une semaine plus tard, je recevais une lettre du Cherche-Midi qui me parlait de cette nouvelle particulière en me demandant également si j’écrivais un roman. J’ai donc plongé avec frénésie dans ce qui était pour moi, un encouragement et un signe du destin.

    Pendant que j’achevais Momo qui kills, en parallèle, j’imaginais d’autres nouvelles que j’envoyais aux deux éditeurs respectifs. Ca me reposait la tête et me faisait prendre un peu de distance avec le personnage principal Momo qui était parfois, très obsédant. Et puis... J’ai rencontré mes interlocuteurs en chair et en os et j’ai senti que mon nid était au Cherche-Midi, en la personne de Pierre Drachline, écrivain, critique et directeur littéraire.

    La qualité d’écoute et le respect du travail de l’écriture sont exceptionnels chez cet homme d’une autre époque. Son intégrité également. J’ai conscience de vivre un moment mythique et rare.

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    -M.A : Vos romans sont de courts récits, vifs, et très durs. Pourquoi cette brutalité ?

    -F.M : L’écriture est avant tout un rituel jubilatoire. Quelquefois, c’est juste une première phrase ou un mot qui vous fait décoller. Je travaille sans plan. Juste une idée un peu abstraite ou un bout de situation et puis j’accompagne mes personnages au fur et à mesure qu’ils se présentent dans ma boîte crânienne. Une fois qu’ils sont là. Je suis eux. Je sais intuitivement comment ils respirent, comment ils s’habillent, comment ils vont réagir. Je peux entendre leur souffle. Ca relève de l’empathie. Ils me poursuivent même dans mes rêves. J’ai écrit quelquefois des chapitres entiers évadés directement de mes nuits agitées.

    L’écriture est une alchimie curieuse entre l’inconscient, le vécu fantasmé, les fêlures et la rêverie facétieuse.

    Je crois que ma littérature trouve son haleine dans un rythme musical. D’ailleurs, j’accouche toujours des mots en osmose avec la musique poussée à son extrême. Les tympans remplis de Led Zeppelin, Patti Smith, P.J Harvey, Léo Ferré ou Wagner... tout dépend de l’humeur.

    -  Vous dîtes de courts récits ?

    J’ai horreur du gras, des fioritures et des phrases creuses qui comblent un vide créatif.

    Quant à la brutalité... Mes personnages sont sur le fil du rasoir. L’animalité leur sert de carapace mais ce sont des êtres profondément blessés et trahis. Ils portent une tendresse sous-cutanée, invisible à l’œil nu.

    -M.A : Vos romans s’écrivent sur un mode désenchanté, mais aucun de vos personnages ne le sont. Je veux dire, à côté des personnages d’un Houellebecq, cyniques, désespérés, les vôtres rêvent de grandeur. -Pensez-vous qu’à l’aube de ce nouveau siècle cette utopie-là est encore possible ?

    -F.M : Si on ne préserve pas l’utopie, on peut se tirer une balle dans la tête. Rien ne sert de vivre une vie, gris peau de souris. Le monde a évolué grâce aux chimères et aux rêves de quelques illuminés. Une société stagne et sombre dans le pourrissement lorsqu’elle décapite le feu.
    Croire que l’inaccessible est possible le rend à terme, possible.

    Pour lire la suite cliquez ici :www.francamai.net/article.php3

     


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